Avec l’Aide de la Haute Magie

Chapitre  VIII –  Londres est une belle Ville (1)

par Gerald Gardner

version française Tof & Xavier

 

 

Le lendemain, étant un des nombreux jours attaché à un saint était aussi un jour un jour férié à Londres. Il s’y tenait la grande joute à Smithfield. Il semblait à Jan et Morven, qui étaient particulièrement endormis, que la ville était en émoi depuis l’aube. A six heures les cloches de nombreuses églises ont sonné avec celles de Saint-Paul et ils leur fut impossible de dormir plus longtemps, ils se sont tous levés et sont allés à la messe.

L’intérieur de la cathédrale était l’un des plus impressionnants au monde. Elle était d’une taille inhabituelle, avec des piliers qui éloignaient la pénombre du toit et lui donnait une noblesse austère. On avait l’impression que la main de l’homme seule n’avait pas pu réaliser cela. Les volutes d’encens et le chant solennel annonçaient la procession des prêtres. Les chants sonores en latin montaient et descendaient, enflaient et rebondissaient, alors que sous les arches une vaste mosaïque de couleurs, jaune, vert, bleu, rouge et or se balançait comme un champ de coquelicots multicolores dans le vent tandis que les gens s’agenouillaient, se relevaient et s’agenouillaient une fois encore sur les pierres nues. Tout exprimait la volupté mêlée d’austérité caractéristique du moment. Le soleil qui montait traversait la fenêtre orientale et traversait l’atmosphère poussiéreuse formant un puits de lumière dorée qui atteignait la porte occidentale. Pour Morven ce devait un don que Dieu faisait à la cérémonie.

Alors que les prêtres sortaient et que leurs chants s’éteignaient, les citoyens poussaient et se bousculaient les uns les autres dans les rues étroites où les avancées des toits étaient si profondes que le soleil pouvait à peine pénétrer entre les maisons. Seule une bande de bleu trahissait l’existence du ciel. Morven, qui regardait leur hâte de s’en aller, se demandait si ces gens allaient à la messe pour l’amour de Dieu ou par crainte de l’Eglise. Il n’y avait pas à hésiter: entre ces derniers et les siens qui se réunissaient le jour du sabbat, on voyait bien ceux dont la participation au culte était la plus sincère. Si on les laissait choisir, ces gens là ne retourneraient-ils pas à la religion qui était le plus facile à suivre et qui leur procurerait le plus de plaisir ? Les habitants de Londres semblent être plus mondains, ne pensant qu’à la quête de richesses et à la conquête du pouvoir temporel, sont agressifs et lestes à se battre pour protéger leurs droits... en opposition directe avec ce qu’enseignait le Christ dont le nom arrivait si facilement sur leurs lèvres et dont ils avaient célébré la messe sans aucun esprit d’humilité.

La grande animation de la journée avait lieu à Smithfield et c’est là qu’ils se sont rendus. Inutile de demander où c’était car tout le monde parlait à voix haute de la joute et tous y allaient. Ils n’avaient qu’à suivre la foule. Le terrain de joute avait été mis en place près du village de Holborn, dans un grand pré plat dont l’herbe venait d’être tondue, il y régnait donc une bonne odeur de foin.

Le terrain de joute occupait le milieu d’un grand domaine et on avait installé des gradins en bois brut de chaque côté pour que les femmes de la noblesse puissent s’y assoir. Chaque chevalier inscrit pour la joute avait son pavillon au-dessus duquel flottait une oriflamme portant ses armoiries brodées sur un fond de soie. Son armurier, ses cavaliers et six autres serviteurs œuvraient ou flânaient en attendant que la joute commence. Ces pavillons étaient magnifiques, c’était des notes joyeuses avec leurs banderoles flottant au vent. Ils étaient parfois entièrement blancs, parfois rayés ou encore à damier. Thur reconnaissait quelques pavillons, mais il ignorait la signification de la plupart d’entre eux, même si les gens les connaissaient bien et exprimaient franchement leur opinion sur celui qui portait ces couleurs, son caractère, ses chances de vaincre et les espoirs qu’ils avaient pour le lutteur, qu’ils prédisent une victoire ou une défaite. Il était encore tôt, les nobles et les riches marchands n’étaient pas encore arrivés et la foule errait à la recherche d’autres spectacles.

A l’écart du terrain de joute il y avait une sorte de foire. Les stands avaient été installés dans un grand cercle à bonne distance. Il y avait de quoi manger et boire, et on y vendait des petits objets susceptibles d’intéresser les acheteurs par leur nouveauté. Il y avait partout des colporteurs qui avaient déballés par terre leurs marchandises. Is vendaient des rubans, des insignes, de la broderie, des bijoux fantaisie et des médailles pieuses. Il y avait aussi des cornemuseux, des chanteurs, des danseurs, des jongleurs, des nains, des mendiants, des personnes difformes affichant leur monstruosité... tous abondaient. Ici et là il y avait des groupes de danseurs réunis autour d’un cornemuseux qui se louaient à la journée ou à l’heure à toute personne prête à les payer pour leurs services. Il y avait deux terrains de combats de coqs dans les coins opposés du terrain de joute où l’on entendait le chant des oiseaux dans une constante clameur rauque. Il y avait des combats de bâton, une forme de concours qu’appréciaient tout particulièrement les apprentis londoniens et où ils étaient très habiles. Pour ceux qui préféraient le tir à l’arc il y avait aussi des cibles pour archers.

Les bagarres étaient fréquentes, surtout parmi les groupes rivaux d’amuseurs et elles étaient généralement réglées en faisant appel au public qui faisait preuve d’une véritable impartialité et exerçait une sorte de justice sommaire en essayant de prêter attention à tous avec bonne humeur. De nouveaux groupes de personnes continuaient d’affluer, des familles entières avec leurs enfants et les animaux. Tout le monde s’asseyait sur l’herbe, chaque groupe avait amené un énorme panier de nourriture, que comme le faisaient londoniens depuis que Londres existe, ils ont attaqué avec voracité dès qu’ils sont arrivés et ont continué à manger durant toute la journée sans aucune diminution apparente de leurs réserves. Un groupe de jongleurs s’était installé à proximité d’une cible de tir à l’arc. Parmi eux il y avait un nain bossu qui faisait des acrobaties vraiment amusante et très sophistiquées et à qui les gens donnaient pas mal d’argent lorsqu’il les laissait toucher sa bosse. Quand ce fut fini tous on entonné un chant pas très mélodieux. Les deux frères Bonder se sont détourné pour regarder le tir à l'arc et ils furent bientôt rejoints par Morven et Thur.

 

 

 

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