Avec l’Aide de la Haute Magie

Chapitre  VI –  Ils Quittent la Forêt (2)

par Gerald Gardner

version française Tof & Xavier

 

 

En en parlant tous ensemble, ils ont perfectionné les détails du plan de Thur. Ils ont décidé qu’ils devaient se hâter vers Londres et se perdre au cœur de la grande ville. De là Jan et Olaf rentreront seul à la maison en éclaireurs et Thur et Vada les suivront quelque temps plus tard, Vada se présentera comme la nièce de Thur. Ils raconteraient que le frère mourant de Thur lui a demandé de s’occuper de sa fille par charité.

« Et » a dit Thur, « si l’un d’entre vous a une meilleure idée d’histoire, je veux bien l’écouter. »

Il a eu un moment de silence, puis tous ont secoué solennellement la tête et Vada a dit : « C’est vraiment un monde désespérant, il y a trois hommes honnêtes et moi un pauvre diable que vous avez sauvé, mais vous n’en serez pas récompensé, au contraire, cela vous met en danger. Sans moi vous seriez en paix. Je risque de vous mener à la mort ! 

- Non, c’est nous qui sommes allés vous chercher, Vada » a résolument objecté Olaf, mais Vada a poursuivi : « Pourtant c’est moi qui était en danger avant que vous ne veniez.

- ce n’est pas très important » a dit Thur avec énergie. « Cela ne te sied guère ma fille de parler de la sorte, toi qui fait l’objet d’un amour si ardent. Je n’ai jamais vu un homme avec une aussi grande dévotion et vraiment désintéressé.

- Vous parlez de John Landlord ?

- Oui, Vada, c’est ça. Et comme il s’est si bien occupé de toi, tu aurais pu le payer en retour ...

- Non, ça ce n’est pas possible ! » L’interrompit-elle avec un regard furieux.

« Au moins avec gratitude pour vous avoir sauvé la vie »  a poursuivi Thur d’une voix égale.

« C’est une pauvre récompense que de s’asseoir et souhaiter la mort, même s’il ne peut pas vous entendre. Sans lui, ces canailles de persécuteurs nous auraient attrapés aux portes de la ville. Il a retardé leur arrivée sans se soucier des conséquences, ni penser à sa propre sécurité. Il te faut donc être joyeuse et chasser de ton esprit ces épreuves. »

Vada a admis la vérité et la sagesse de ce conseil. Jan et Olaf regardaient bizarrement, mais Thur a maintenu son propos tout en la fixant d’un regard sympathique. Le rouge lui monta au joues lorsqu’elle dit :

« Je vous demande pardon. Il ne faut pas parler de la sorte, je ne voulais pas être ingrate. Je donnerais ma vie plutôt que l’on fasse du mal à quelqu’un par ma faute ... »

Thur a souri chaleureusement. « Pour ça on peut te croire, Vada, mais je pense à autre chose. Il faudrait changer ton nom car il peut nous perdre. C’est un nom étrange que je n’avais jamais entendu avant et je pense qu’on le retient facilement » dit-il  d’un ton badin, car il s’attendait une résistance, mais Vada a fait un signe d’assentiment.

« Oui, c’est vrai. Thur vous êtes plus sage que moi et vous voyez plus loin que les autres. Ma mère avait un nom secret pour moi. Elle l’utilisait toujours quand nous étions seules toutes les deux et il me tient à cœur à cause d’elle. C’est le nom que j’ai reçu quand j’ai fait le serment dans le Cercle.

- Mais cela ne te chagrinerait pas de l’utiliser maintenant ma fille ?

- Non, cela m’apaiserait plutôt. Appelez-moi Morven. »

Pourtant, en disant cela, ses yeux se sont remplis de larmes, mais elle sourit courageusement à Thur et a répété plus fermement : « Morven.

- On fera comme ça » a dit Thur, en s’abstenant de répéter ce nom.

Olaf a brisé le silence qui a suivi en disant: « Il y a quelque chose à laquelle j’ai réfléchi, les ecclésiastiques sont souvent aussi magiciens, Thur. Comment est-ce possible ?

- C’est parce que tout apprentissage passe par l'Église et que la magie exige un long apprentissage. De nombreux évêques pratiquent la magie, on sait même que des papes l’ont fait. Tous les livres de magie viennent de Rome ou d’Espagne où la Sainte Église est tout puissante.

- Il y a bien plus de magie à l’Est, c’est de là qu’elle provient » a corrigé Morven.

« C'est vrai, mais je parle de ce qui est enseigné en Occident.

- Comment avez-vous commencé à étudier la magie, Thur ? » a demandé Olaf rapidement.

« Quand nous avons fuit Fitz-Urse avec votre père, les Normands étaient à nos trousses. Nous avons eu peu de chance lors de notre vie et nous avons eu trois jours vraiment difficiles à nous cacher dans une forêt. Nous avons ainsi pu ébranler nos ennemis et nous échapper pour de bon. Nous avons pris un bateau en partance pour l’Espagne. Ton père n’avait que vingt deux ans, moi dix de plus, et nous avons rejoint une bande de mercenaires avec qui nous avons combattus. Après un moment, votre père a eu le mal du pays et a souhaité rentrer, ce que nous avons fait et il s’est marié et moi je suis reparti combattre.

Il m’a fallu plusieurs années avant de revoir votre père. Il a été tué lors de notre combat suivant et une fois de plus je suis rentré pour porter la triste nouvelle à votre mère.

- Mère nous a souvent dit combien vous l’avez réconforté et comme vous avez été bon avec elle » a dit Olaf, avec son sourire bienveillant et sage, un sourire surprenant chez quelqu’un de si jeune.

Thur l’avait remarqué, avec la surprise que ce sourire suscitait toujours en lui. « La vie de mercenaire était une vie agréable tant qu’on avait un engagement, c’est ce que je pensais lorsque j’y suis retourné, mais votre père me manquait cruellement. Mais ça a rapidement pris fin. J’avais un peu d’argent de côté et je voulais faire autre chose, j’avais appris à faire des pansements, à m’occuper des blessures et soigner les fièvres. Voilà comment je suis devenu un pauvre étudiant à Cordoue et que j’ai étudié la magie et l’astrologie ainsi que la connaissance des plantes et la façon de les préparer.

- Est-ce que Don Menisis vous a enseigné beaucoup de choses ? » a demandé Jan.

« Oui, il professait longuement et enseignait la théorie de la magie, personne n’aurait pu le faire mieux que lui, mais il ne nous en a pas enseigné la pratique.

- Pouvez-vous nous résumer ce qu’il vous a dit de la théorie de la magie ?

Thur a ri, « Il faudrait un siècle pour en parler vraiment, mais pour résumer en quelques mots... Les prêtres nous disent que Messire Dieu est là haut dans le ciel avec les saints et les chérubins. Il est trop important pour se soucier de nous pauvres vers de terre. Nous pouvons prier son  Fils et sa mère, Notre-Dame, mais même eux sont trop importants pour tenir compte de nos demandes, mais les rois et les empereurs peuvent, peut être, communier avec eux.

Donc, dans sa grande sagesse Dieu a créé les saints, pour nous les humbles, et c’est à eux que nous pouvons adresser nos prières et faire de riches présents... et en promettre d’autres ... s’ils nous aident. »

 

 

Retour