Avec l’Aide de la Haute Magie

Chapitre  IV – La Sorcière (2)

par Gerald Gardner

version française Tof & Xavier

 

Thur n’arrivait pas à avancer, il a essayé une autre approche.

« Eh bien, elle ne veut pas de vous?

- Non, c’est clairement contre nature.

- Demandez à nouveau, monsieur.

- J’ai déjà demandé sept fois.

« Vous savez ce que disent les saintes Écritures ... « Avant d’avoir demandé soixante-dix fois sept », a dit Thur de façon désinvolte.

« Soixante-dix fois sept... soixante-dix fois sept, répéta l’aubergiste. « C’'est clairement contre nature. Heh! » Et avec ce grognement lugubre il est retourné dans ses ténèbres.

Pendant ce temps Olaf s’apaisait devant la porte fermée et regardait autour de lui. Une fillette et un enfant plus petit jouaient dans une mare d’eau boueuse où flottaient des copeaux d’écorce. Il s’est dirigé vers eux. La demoiselle regardait en direction d’Olaf sous ses cheveux ébouriffés, elle avait remarqué ses boucles blondes et ses beaux vêtements. Olaf gonfla ses joues et souffla fortement, faisant des vagues minuscules sur l’eau. La petite barque était secouée et l’enfant poussa des cris de joie en battant des mains et la demoiselle sourit.

« Je vais vous montrer quelque chose d’encore mieux » a proposé Olaf, « allez me chercher une branche et une feuille. »

L’enfant a détalé et est revenue avec un rameau feuillu qu’elle avait arraché à un buisson voisin. Olaf a cassé une brindille, y a fixé une feuille en la perçant en deux endroits et habilement a fixé la brindille sur un des morceaux d’écorce avec l’aide de son poignard. Il a ensuite mis le tout à l’eau, un petit bateau avec une voile et un mât.

« Oh, oh » a dit l’enfant émerveillé et à nouveau la fillette sourit, mais elle semblait trop timide pour parler. Olaf a réfléchi sur la façon de lui délier la langue et il s’est souvenu de deux petits pains qui lui avaient été donnés ce matin par l’hôtesse à l’auberge. Il les tira de sa poche et vit avec pitié l’avidité dans les yeux des deux enfants.

Silencieusement, il les leur donna et les regarda manger. « Il y a une vieille femme chez moi dans notre village. Elle a un chat noir et chevauche un manche à balai. Les hommes disent que c’est une sorcière. Quand elle est dans la rue on crie tous : ‘Sorcière! Sorcière!’ et quand les grands ne sont pas là, on lui jette des pierres. »

La dernière miette de pain fut dévorée, et la fillette avait retrouvé sa langue, toute réticence était oubliée et alors que la plus petite retournait à son bateau l’autre s’est mise à parler de ce sujet fascinant : « Nous aussi avons une sorcière, enfin, les femmes disent que c’en est une, mais on en parle pas aux hommes. »

« Est-elle vieille? » a demandé Olaf, les yeux écarquillés.

« Pas si vielle que ça... pas plus... pas plus de cent ans. Elle vit dans la hutte près de l’eau, à un jet de flèche d’ici et elle n’est pas d’ici. Son mari l’a amenée ici il y a trois ans, mais il est mort deux semaines plus tard et elle vit seule ici.

- C’est une véritable sorcière? »

La fillette haussa les épaules. « Peut-être. Les femmes la détestent.

- Et toi?

- Non, elle est gentille et guérit les malades. Plusieurs fois des hommes l’ont demandée en mariage mais elle n’a jamais accepté. John Landlord voulait l’épouser, mais elle ne voulait pas. 

- A-t-elle tué quelqu’un?

- Non, juste son mari. » Elle lui a raconté qu’un prêtre était venu la veille pour demander s’il y avait une sorcière ici et il a dit à tout le monde que c’était un pécher que de se mêler de sorcellerie et que les sorcières devaient être attrapées et brûlées. Les hommes niaient obstinément qu’il y ait sorcière ici, mais ils ont aussi dit au prêtre qu’il y en avait beaucoup dans le village voisin.

« Et il y en a? » Olaf a demandé hors d’haleine.

« Non, je ne sais pas. La femme s’appelle Vada. Elle ne fait pas de mal, mais les femmes disent qu’elle a ensorcelé les hommes et disent qu’elle est pire qu’une sorcière. Je ne sais pas. »

Olaf a aussi appris... que le prêtre avait passé son chemin, insatisfait par son enquête et avait promis de revenir rapidement. A ce moment une tête ébouriffée est sortie de l’une des huttes, et une voix a crié: « Maud! »

La fillette a dire : « Ma mère appelle, » et en attrapant l’enfant par la main elle l’a emmené dans la maison sans tenir compte de ses protestations, mais il tenait toujours le petit bateau serré dans sa main. Olaf a ri et les salua jusqu’à ce qu'ils disparaissent dans leur maison misérable.

« Pauvres petits, » a-t-il dit à haute voix, puis il a repoussé les idées noires qui l’affligeaient, il s’est tourné et est retourné dans l’auberge. Thur leva les yeux quand il entra et voyant son grand sourire (ce n’était pas le petit sourire qu’Olaf affichait habituellement lorsque tout allait bien pour lui) il su qu’il avait l’information dont ils avaient besoin. Thur s’est levé instantanément et a terminé sa de bière et dit : « Viens, Jan, il se fait tard. »

Il a payé la note et laissé un pourboire, mais même la vue de l’argent n’a pas déridé l’aubergiste. « Le chemin pour la ville, mon ami?

- Suivez le chemin vers la gauche, mes maîtres, pendant environ douze kilomètres à travers champs.

- Merci beaucoup, mon ami et que la chance vous assiste. Souvenez-vous ...

- Oui, soixante-dix fois sept. C’est vraiment beaucoup ... clairement contre nature. » Et il a recommencé à grogner et a refermé la porte derrière eux en secouant la tête.

« Je n’ai jamais vu un homme aussi troublé par l'amour », a dit Thur avec compassion, puis, se tournant brusquement vers Olaf, « Eh bien, mon garçon? 

- Elle habite là-bas, en bord de l'eau.

- Tu en es sûr?

- Sans aucun doute c’est bien elle et c’est aussi la femme qui a pris le cœur de notre hôte.

- Je le pensais aussi, mais je n’ai pu obtenir de renseignement. C’est bien, Olaf. »

 

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