Avec l’Aide de la Haute Magie
Chapitre XX - Tous les Chemins Mènent à Rome (3)
par Gerald Gardner
version française Tof & Xavier
Il a tourné ses yeux brillants vers le sous-prieur. « Regardons maintenant ce que tu as trouvé chez le médecin ? As-tu ramené ce que je t’ai demandé ?
« Non, mon seigneur, » a répondu le sous-prieur, « je n’ai que ces livres et ce qui se trouvent dans le sac ici. Il y a des instruments de magie, je pense, et quelques livres d’astrologie, des livres médicaux et des poèmes sans grande valeur, mais nous n’avons rien pu trouver sur la magie ni le moyen de retrouver la jeunesse ou les appétits de la chair. »
L’abbé a réfléchi et s’est tourné vers Jan. « Dites-moi, Sir Jan, vous connaissiez ce Thur. On dit qu’il a fait venir une vieille femme dans sa maison et que par sa magie il l’a rendue à nouveau jeune. Savez-vous quelque chose à ce sujet ?
- Il n’y a pas de magie dans cette histoire, » a dit Jan, « Il a nourrit une jeune fille affamée et l’a soignée car elle était malade, je ne vois pas où est la magie dans cette histoire.
- Eh bien, où est la fille ? » a demandé l’abbé au sous-prieur. « Je vous ai dit de me l’amener. Je dois la questionner.
- On n’est pas parvenu à la trouver, » a dit le sous-prieur.
- Oh, ho, je vois ! » a dit l’abbé en riant. « Bien, bien, je vois, mais il n’aurait vraiment pas du prendre Satan pour aller faire la fête et il a pourtant toujours prétendu qu’il ne s’intéressait pas aux filles. Je suis vraiment en colère contre lui. Bien, bien, si seulement j’avais sa jeunesse, » puis se tournant vers Jan il lui dit : « Je vous demande pardon, Sir Jan, c’est juste une histoire de discipline dans l’abbaye. Videz maintenant une coupe de vin avec moi puis vous pourrez aller vous occuper de vos autres affaires. Il se fait tard. J’espère que vous me ferez l’honneur de rester à l’abbaye cette nuit et que vous souperez avec moi. Nous réunirons la Cour Chrétienne demain, » et l’abbé a commencé à examiner les objets ramenés de chez Thur comme un enfant recevant de nouveaux jouets. « Plus le vin. Buvez Sir Jan. Pour demain, j’espère que Stephen sera de retour, mais je pense pouvoir me souvenir des points principaux. Tout se passera ici et sera enregistré dans les dossiers du tribunal de l’abbaye. Stephen vous conseille de porter des copies de ces dossiers à la cour du roi et de payer une taxe. Ca va marcher. Si vous avez besoin d’argent, je peux vous donner un bon prix pour la ferme à Highcliffe ou celle de Sumerford. Ils n’ont jamais posé de questions à ceux qui venaient verser de l’argent ces derniers temps ! La Recette Royale vous donnera une garantie juridique, notre décision sera alors définitive et plus personne ne pourra la contester. Prenez encore un peu de vin, Sir Jan. Maintenant je suppose que vous souhaitez faire les offrandes habituelles à l’abbaye pour qu’on dise des prières. » Jan a soudainement réalisé que depuis quelques minutes le discours de l’'abbé semblait moins fluide. « Hic ... et pour l’âme de votre ami qui vient malheureusement de mourir… hic !
- Ensuite, il ne faudra plus se battre ? » a demandé Jan.
« Mon cher enfant, » a répondu l’abbé, « la dernière chose nous voulons en ce moment c’est qu’on se batte... hic ... nous sommes tous des hommes de paix. Une vieille querelle de famille s’est finalement reg… reg… réglée. Vous allez vous faire votre place dans le comté et nous espérons bien ne plus entendre parler de combats et de guerres. Oublions le passé et tous ces mauvais souvenirs... »
Jan avait réalisé maintenant, que l’abbé était décidément le pire ivrogne qu’il ai rencontré et regarda avec étonnement le sous-prieur, qui eut un petit rire : « Mon seigneur est toujours comme ça à cette heure de la nuit, mais quoi… il a dit la vérité. Frère Stephen s’est donné beaucoup de peine sur votre cas et tout est clair maintenant. L’abbé sera sobre demain lorsqu’il rendra sa décision. Les parchemins sont déjà prêts. Vous ferez votre demande et elle sera accordée. Il n’y aura personne pour y trouver à redire. »
Il a dit à Jan qu’il devait prendre congé, mais comme l’abbé été plongé dans une sorte de torpeur, Jan s’est éclipsé tranquillement pour aller retrouver Morven, laissant l’abbé marmonner « Elixir de longue vie ... la pierre ... » et se plaindre de l’absence de Frère Stephen.
* * *
Pendant ce temps, Morven, accompagnée par le fidèle Simon Pipeadder, étaient cachés dans les buissons et regardaient avec impatience en direction de la route. Ils ont tout à coup entendu le galop d’un cheval et un cavalier venant de la ville est apparu. Un instant Morven espéra qu’il s’agissait de Jan, mais une fois le cavalier plus près d’eux, elle a reconnu Frère Stephen.
Morven s’est précipitée vers lui en l’appelant par son nom et lorsqu’il l’a vu il a arrêté brusquement son magnifique cheval noir. « Je suis heureux de pouvoir vous dire adieu, » a-t-il dit doucement, « car je m’en vais, je vais faire un bien long voyage.
- Avez-vous des nouvelles Jan ? » balbutia la jeune fille anxieuse.
Ton Jan va très bien, » a dit Stephen en souriant. « Il aura son château et ses terres, ça ne va pas poser de problème, je m’en suis occupé. Quant à moi, je vais chez Lothaire, Comte de Signi. Les étoiles ont dit vrai. Au début je ne comprenais pas, mais maintenant tout est clair et je lui ramène ce qu’il m’a envoyé chercher. Je vais à Rome et là j’obtiendrai le pouvoir suprême pour nous deux ! » Ses yeux brillaient de fanatisme.
« Vous reviendrez dans ce pays ? » a demandé Morven
« Oui, je reviendrai, quand j’aurai fait tout ce qui est nécessaire pour libérer le pays de l’emprise des tyrans ... mais, même si j’ai arrangé tes affaires, y a-t-il quelque chose dont tu ais besoin pour plus tard, quand je reviendrais ...
- A l’abbaye ?
- Non, pas à l’abbaye ! C’est la dernière fois que j’ai mis les pieds là-bas, j’en ai plus qu’assez de faire des courbettes à cet ivrogne stupide. Je dis que quand je reviendrais, toute l’Angleterre saura que la Grande Charte des libertés et des droits de l’homme apportera la liberté et la justice à tous. Voilà quel est mon destin, Morven.
- Cette Grande Charte ?
- Oui. C’est ce qu’a prédit mon horoscope et c’est pour cela que j’ai volé les parchemins que Thur avait lui-même volé il y a bien longtemps. Je les amène à Lothaire di Signi, que les hommes appellent Pape Innocent III. Il sera le maitre de l’Europe, comme je serais celui de l’Angleterre, et je pense qu’on se souviendra des noms de Stephen Langton et d’Innocent III partout dans le monde pendant un millier d’années. Pour cela, moi Stephen Langton, j’ai abandonné tout espoir de bonheur sur cette terre, mais on se souviendra de moi comme celui qui a apporté la Grande Charte au Parlement, ce qui apportera la véritable liberté en Angleterre et de là elle se propagera partout dans le monde.
Et quant à toi Morven, tu pourras te souvenir qu’à un moment, toute cela et l’histoire du monde lui-même a dépendu d’un hochement de ton adorable tête. Sois bénie et portes-toi bien !
Stephen piqua son cheval avec ses éperons, salua Morven et parti, la laissant au bord de la route, le regarder s’éloigner. Il galopait comme une flèche, prêt à accomplir son destin avec l’aide de la Haute Magie, tout comme elle avait accompli le sien.
FIN