Avec l’Aide de la Haute Magie

Chapitre  XI –  Magie Musicale (4)

par Gerald Gardner

version française Tof & Xavier

 

 

Morven et les Bonder étaient dans la chambre à coucher du Thur. Le mur du pignon avait quatre pieds de haut et était surmonté d’une lourde poutre qui soutenait les poutres du toit. Morven a délogé deux très grands clous et les a montré à Jan et Olaf que l’une des extrémités du mur était mobile. A l’intérieur il y avait une cache avec les instruments magiques, des parchemins et les poupées de cire qu’ils venaient de faire. Elle en a pris deux et en a donné une à chacun des frères quelque peu étonnés. « Tenez, prenez-les et portez-les toujours sur vous, ils vous protégeront. Faufilez-vous là-dedans, ça va sur toute la longueur du mur, poussez les outils devant vous. C’est un peu étroit, mais vous pourrez y caser. »

L’un derrière l’autre les Bonder ont rampé derrière le mur, Jan poussait les objets devant lui. Quand ils furent en sécurité dans la cache, Morven a remis en place la trappe dans le mur ainsi que les grands clous qui la bloquaient puis elle est retournée dans la pièce du bas. Elle a descendu les marches dans sa robe verte décolletée qui glissait sur ses épaules et ses cheveux roux brillaient dans l’escalier de pierre grise éclairé par deux lampes vacillantes. Lentement, elle leva sa main droite et recoiffa ses cheveux en arrière, un signe convenu entre elle et Thur signifiant qu’Olaf et Jan étaient en sécurité. Soulagé, Thur s’est tourné vers Byles et a lu dans ses yeux qui fixaient la jeune fille, la raison secrète de sa visite. Dans le silence tendu Morven a senti la cause de la perturbation, elle était consciente à la fois de la colère et l’impuissance de Thur et de son inquiétude pour elle et pour les frères Bonder. Byles a fait un geste, un geste de conciliation et de salutation : « Bonsoir maîtresse, » a-t-il dit poliment, en passant le bout de sa langue sur le bord de ses lèvres.

Morven inclina la tête pour saluer et se déplaça lentement dans la pièce et s’assit en reprenant sa harpe. Byles l’a suivi du regard avec les yeux d’un loup affamé.

Thur regardait Byles comme s’il l’aurait étranglé avec joie, il avait vraiment envie de lui serrer le cou. « Byles, » a-t-il dit d’un ton qui a fait sursauter Byles. « Vous êtes venus pour chercher ? Allez-y alors, cherchez, toutes mes portes vous sont ouvertes. » Il se tenait au centre de la pièce pendant que les autres faisaient semblant de fouiller les armoires et les dépendances. « Quoi, vous ne trouvez rien ? » a-t-il dit. « Vous pouvez encore fouiller le premier étage » en réfléchissant à toutes les possibilités. Allaient-ils voir les cercles magiques, feraient-ils le lien entre ces cercles et Morven ? Il n’était par assez armé pour lutter contre six hommes en armes. Il était l’unique protection de Morven. S’il les attaquait ou s’ils s’en prenaient à lui, il serait tué et tous les hommes pourraient alors s’en prendre à elle. Il y avait de forte chance que Byles emmène Morven ou même qu’il la tue et dans ce cas Jan et Olaf allaient périr misérablement bloqué dans leur petite cachette. Plus personne ne parlait, les six hommes en armes ne savaient plus trop que faire, ils ne voulaient pas fouiller l’étage, il ne pouvait pas y avoir de criminels. Morven assise, s’accouda contre la harpe, le regard perdu dans le vide alors que tout le monde la regardait. Byles ne savait que dire. Il souhaitait que quelqu’un d’autre provoque la querelle.

Un des hommes s’est mis à bâiller. « C’est un travail qui donne soif » a-t-il commenté.

« Oui » l’a soutenu un de ses compagnons.

« Oui, oui, ce travail donne  soif, » ajouta un troisième.

Thur a jeté un peu d’argent sur la table. « Tenez, allez donc boire un verre à la taverne. »

Les hommes se sont emparés de l’argent et se dirigeaient vers la rue quand Byles s’est interposé : « Non, mes ordres étaient de rester et surveiller, la ville est en danger et cette maison risque fort d’être attaquée. Les ordres sont les ordres, Maitre Médecin. »

Thur a vu là une opportunité. « Dans ce cas, » a-t-il dit en allant vers l’armoire pour en sortir des pichets et une grande cruche qu’il posa sur la table non sans y avoir versé discrètement un petit paquet de poudre. « Le tonneau est dans la cuisine, allez tirer des bières et buvez un coup. »

Mais Byles le regardait de façon insistante. Il a prit le pichet et l’a renversé. La poudre en est tombée. « Vos pichets sont bien poussiéreux, Maître Médecin. Va le laver avant de tirer la bière »  dit-il à l’un de ses hommes.

Thur réfléchit rapidement, les hommes se pressaient autour de la bière. Il a appelé : « Morven, va chercher ton manteau. »

« Que faites-vous maintenant, Maître Médecin ? » dit Byles en protestant de façon menaçante.

« Ma nièce est en danger. Je l’emmène au château pour la mettre sous la protection de la Dame Upmere qui a déjà eu des bontés pour moi. Envoyez un de vos hommes avec moi, si vous craignez que je ne revienne pas.

- Pas si vite, » reprit Byles, grognon. « Mon maître est parti avec Fitz-Urse en me laissant le commandement. Le jeune maîtresse est suffisamment en sécurité ici ... nous veillerons à ce qu’il ne lui arrive rien, » a dit Byles en regardant d’un air malveillant.

La voix de Morven brisa le silence. « Je ne suis pas en danger, mon bon oncle. »

Thur était sur le qui vive. Il voulait dire à Morven de quitter la maison en courant à son signal. Il avait une chance de pouvoir les tenir en respect jusqu’à ce qu’elle atteigne la maison d’un voisin, mais il devait d’abord atteindre son épée et il ne voyait pas comment avertir Morven. Les hommes sont revenus avec le pichet de bière et l’ont posé sur la table en en renversant un peu, chacun fut servi et ils se sont mis à boire.

« A votre santé, maîtresse. Thur, vous avez de la chance, une telle beauté qui égaye votre maison lugubre. »

Morven a souri et passé ses doigts sur les cordes de la harpe.

« Il vous arrive de chanter, douce maîtresse ?

- Oui, quand le cœur m’en dit.

- Vous savez aussi raconter des histoires, maîtresse ? » a demandé l’un des hommes. « Des histoires de sorcières, de lutins, de loups-garous, vous voyez ?

- Non, je ne connais pas d’histoire de sorcières, un chrétien ne raconte pas ce genre d’histoire. On ne parle pas de ces choses ici, c’est une maison honnête, monsieur. Et vous, vous en connaissez ?

- Moi ? Les saints l’interdisent » a-t-il répondu en vitesse.

A ce moment quelqu’un a frappé à la porte. Thur est allé ouvrir. Quel que soit l’intrus, il ne pouvait pas bien aggraver la situation. Deux moines se tenaient là, les Frères Stephen et Hobden. Thur a accueilli le premier avec un grand soulagement : « Frère Stephen, vous êtes vraiment le bienvenu et vous de même, Frère Hobden. Stephen, il y a ici des gens qui fouillent ma maison... Byles est venu voir ma nièce avec de mauvaises intentions, sous prétexte de rechercher des hors la loi en ville. Il a de mauvaises pensées, ça ne fait aucun doute. Si vous la conduisez en sécurité je les tiendrai à l’œil aussi longtemps qu’il y aura de la vie est en moi. 

- Les saints nous sont favorables ! » s’écria Hobden.

« Est-ce que la fille est si séduisante ?

- C’est ma nièce, mon Frère, » a dit Thur.

- Oui, oui, » a grommelé Hobden avec aigreur.

 

 

 

 

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