Il est bien connu que Doreen Valiente collectionnait les balais et les livres traitant d'occultisme.
On sait aussi qu'elle hantait les brocantes et y achetait de vieux objets magiques.
Ce qu'on sait peut être un petit peu moins c'est que pendant plusieurs dizaines d'années elle a découpé et collectionné des articles de journaux traitant de sorcellerie.
J'ai eu le bonheur d'avoir accès à une partie de sa collection.
Voici une de ses coupures de presse
:

 

Une heure avec le Dr Gardner,

Le dernier des sorciers

J. D. Jacobson

in « Le Matin » du 31 juillet 1957

 


L’Ile de Man, que baigne la mer d’Irlande, a, depuis des temps immémoriaux, été peuplée de fées et de sorcières. L’ancienne capitale de l’île, Castletown, en comptait un grand nombre, qui tenaient leurs assises dans un vieux moulin connu sous le nom de « The Witcher (sic) Mill ».

C’est à cet endroit que le docteur Gerald Brosseau Gardner, docteur en magie et en sorcellerie, après avoir parcouru toute la terre à la recherche de documents et d’objets ayant trait aux mages et aux enchanteurs, fonda, en 1950, le seul musée au monde consacré uniquement à la magie et à la sorcellerie. Nous disons sorcellerie, mais le terme anglais, « witchcraft », est plus exact, car il signifie la science des « Wica », ou des sages, c’est-à-dire de ceux qui pratiquaient les plus anciens rites de l’humanité, qui remontent à l’âge de pierre. Ce culte primitif du dieu cornu a résisté à des siècles de persécutions et d’horribles tortures, durant lesquels plus de neuf millions de malheureux périrent sur le bûcher, comme sorciers.   

L’originalité de ce musée, est qu’il contient la plus riche collection qu’on puisse imaginer d’amulettes, de talismans, de bagues magiques, de grimoires, d’ustensiles à l’usage des sorcières, ainsi que de livres consacrés à la magie.

On y trouve également un grand nombre de jugements rendus en matière de sorcellerie, ainsi que presque tous les instruments de tortures inventés par la méchanceté humaine. A force de patience et de temps, le docteur Gardner a reconstitué, dans son musée, un antre de sorcière, ainsi qu’une chambre de magicien, avec un autel d’initiation, dont tous les objets sont rigoureusement authentiques et lui ont été donnés ou prêtés par des sorcières décédées, ou même encore en vie, car les rites ancestraux se pratiquent encore toujours dans les réunions secrètes des « coven », dont le Dr Gardner est membre de l’un d’eux.

Ces covens sont armés de pouvoirs redoutables, grâce auxquels leurs « cônes de puissance » empêchèrent Hitler de débarquer en Grande-Bretagne, tout comme ils avaient empêché Napoléon de le faire et stoppé l’Invincible Armada, par leurs incantations et leurs envoûtements.

 A l’occasion de l’exposition de magie, qui se tient actuellement à la salle des fêtes de la ville, et dont le foudroyant succès dépasse toutes les prévisions, nous avions prié le docteur Gardner de nous prêter quelques-uns de ses trésors.

Avec une bienveillance de grand seigneur, ce dernier mit à notre disposition les plus beaux exemplaires de ses collections.

Réunis dans une vitrine, ils font l’admiration des milliers de visiteurs qui, depuis l’ouverture de cette exposition unique en son genre, se pressent dans cette salle dans l’espoir de voir se soulever pour eux un pan de voile de mystère qui recouvre tout ce qui a trait à la magie et à la sorcellerie.

Mais le docteur Gardner a voulu faire plus encore.

Il a tenu à venir personnellement, hier, à Anvers, où, après avoir visité l’exposition avec son épouse et avoir exprimé son enthousiasme pour la richesse et la diversité des objets étalés et son admiration pour les services communaux, qui réalisèrent un tel chef-d’œuvre de présentation artistique, il fur reçu à l’Hôtel de ville par notre bourgmestre, M. Lode Craeybeckx, qui le félicita vivement pour son précieux concours et s’intéressa grandement à ses explications au sujet de la pérennité de l’antique « Witchcraft ».

Dans le courant de l’après-midi, nous avons eu l’occasion de passer une heure avec lui au cours de laquelle il nous expliqua sa « mission ».

Le docteur Gardner est un grand vieillard de plus de 75 ans, au visage triangulaire, à la barbiche en bataille, dont les yeux bleus, étonnamment jeunes, jettent des éclairs. Tout son corps est recouvert de tatouages magiques. Au doigt, il porte une bague d’argent ornée de signe mystérieux. Son poignet droit est orné d’un lourd bracelet de cuivre, indiquant son grade dans l’ordre, où son nom est « Scire. O.T.O. 4 – 7 ». Au côté, il porte une dague de sorcière, revêtue de dessins cabalistiques et qui lui sert à tracer le cercle magique, tandis que dans sa main il tient le marteau de Thor.

J’ai soudain l’impression d’avoir devant moi un pharaon égyptien plusieurs fois millénaire, figé dans une pose hiératique, et recouvert de tous ses attributs magiques.

Mais le docteur Gardner, qui est l’auteur de plusieurs livres fort recherchés, tels que « High Magic’s Aid », « A Goddess Arrives » et Witchcraft Today », se met à me parler de cette « mission » qui lui fut donnée par les sorcières d’Angleterre.

Allez de par le monde, lui avaient-elles dit, et racontez aux gens que nous ne sommes ni folles,ni perverses, mais que nous ne faisons que continuer l’antique religion de nos ancêtres, qui n’est autre que l’adoration du Tout Puissant Dispensateur de Vie. Ce que nous faisons n’a rien de commun avec le jet de sorts ou l’envoûtement. Nous ne franchissons pas l’espace sur un balai ; nous ne célébrons pas de messes noires ; nous n’utilisons pas le sang des petits enfants ; ce sont là de pures calomnies qui ont servi de prétextes à nous condamner au bûcher. Nos pouvoirs sont essentiellement bénéfiques. Nous ne demandons qu’une chose, c’est qu’on nous laisse vivre en paix.

Mon interlocuteur me raconta ensuite que la Grande-Bretagne compte actuellement plus de 400 sorcières et m’apprit, à mon grand étonnement, qu’une sorcière peut indifféremment être du sexe masculin ou du sexe féminin. On dit toujours « elle », en parlant d’un être qui s’adonne à la sorcellerie, quel que soit son sexe.

Je lui demandai alors comment on devenait sorcières et quels étaient les rites d’initiation, à quoi le Dr Gardner me répondit que le recrutement se faisait presque exclusivement de mère en fille.  

Quant à l’initiation, elle consiste essentiellement en une cérémonie, au cours de laquelle la future sorcière est chargée «  de pouvoir magique par tous les assistants, à l’intérieur d’un cercle où peuvent se tenir 13 personnes au maximum ».

- Les sorcières anglaises, dont les rites ressemblent étonnamment à ceux des mystères grecs, n’oeuvrent que pour le bien, ajouta-t-il.

Elles sont convaincues que, par leurs dons magiques, elles pourront influencer l’humanité et arrêter celle-ci sur la pente fatale qu’elle dévale à toute vitesse.  

- Pourront-elles vaincre la bombe à hydrogène ? demandai-je avec anxiété.

- Soyez persuadé qu’elles unissent toutes leurs forces pour éviter cette catastrophe, qui amènerait la fin du monde.

Telle fut la réponse que me fit le docteur Gardner, le dernier des sorciers.

 

 

 

 

 

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