Magie Londonienne

par Kenneth Grant

 version française Tof

 

 

Dans un bâtiment délabré situé autrefois là où se trouve maintenant la tour de Centre Point à Londres il y a eu en 1948 un curieux rite magique. Il s’est déroulé à l’instigation de Gerald Gardner. La pièce dans laquelle a eu lieu le rite était louée à cette époque par une « sorcière » que j’appellerai Mme South. Elle était en réalité proxénète et prostituée et épiçait ses activités d’une touche « occulte » dans le but d’attirer un certain type de clientèle. Accompagné de mon épouse et de Gerald Gardner nous nous sommes rendus dans l’appartement de Mme South après avoir passé l’après-midi avec Gardner dans son appartement de Ridgemont Terrace. Le rite nécessitait la présence de cinq personnes et ne pouvait commencer qu’après l’arrivée d’une jeune femme qu’attendait pour cela mme South. La jeune femme était censée, comme mme South elle-même, bien connaître les aspects les plus subtils de la sorcellerie. Je ne nierais pas le fait que sa sorcellerie s’est avérée être authentique, mais je ne nierais pas non plus qu’elle en savait moins que mme South sur l’art.

Gardner a expliqué que le but du rite était de démontrer sa capacité à « faire descendre le pouvoir ». Il avait l’intention de générer une énergie magique dans le but de contacter certaines intelligences extra-terrestres avec lesquelles j’étais à cette époque en contacts quasi-constants. Le rite consistait en une circonvolution pour nous cinq autour d’un grand sigil tracé sur un parchemin qui avait été tout spécialement consacré. Le sigil avait été créé à mon intention par Austin Osman Spare qui, à cette époque, cherchait lui aussi à contacter des extra-terrestres. Le sigil devait plus tard être consumé dans la flamme d’une chandelle placée sur un autel dans le côté nord de l’appartement. A part cet équipement magique la pièce de mme South ne contenait que deux ou trois étagères de livres sur la sorcellerie et sur « l’occulte » en général. Ces livres avaient sans doute été apportés là pour donner un air d’authenticité à ses activités plus habituelles.

Que ce rite ait eu ou non un effet est ouvert à discussions. Il fut interrompu avant que l’invocation initiale ne soit achevée. Elle consistait en une circonvolution dans le sens du soleil autour de l’autel à une vitesse toujours plus grande selon un cercle toujours plus petit. La sonnette de la porte d’entrée du bâtiment a retenti soudainement dans cet immeuble quasi désert, tout d’abord faiblement, puis plus fort et de façon appuyée. La personne qui insistait à la porte était le propriétaire d’une librairie « occulte » située non loin de l’appartement de mme South. En apprenant que j’étais là, le visiteur a décidé de ne pas monter. Il s’est dirigé vers la brume de novembre qui plus tard cette nuit s’est transformée en un bon vieux brouillard londonien.   

Le but de ce compte rendu est d’illustrer un curieux fait caractéristique de la façon étrange dont agit fréquemment la magie. Le sigil qui devait former le foyer de l’Opération cette nuit là était un esprit particulièrement puissant, que Gardner et mme South auraient sans aucun doute surtout décrit comme « phallique ». Ce fait est important, car peu après cette cérémonie avortée, mme South est décédée dans de mystérieuses circonstances, le mariage du libraire s’est violemment désintégré et lui aussi est mort peu après. Gerald Gardner lui-même n’était plus en grande forme. Mais la tour qui plus tard fut érigée sur le site que ces magiciens ont fréquenté est selon moi un monument qui correspond bien à la futilité du Travail de cette soirée.     

 

 

 

 

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